mardi 12 août 2014

Fakhr ad-Din II et la première ébauche du Liban moderne | Zaman France

Fakhr ad-Din II et la première ébauche du Liban moderne | Zaman France

Fakhr ad-Din II et la première ébauche du Liban moderne

Il y a 442 ans, le 6 août exactement, naissait Fakhr ad-Din II, émir de la prestigieuse maison druze des Ma'n, et gouverneur du Mont-Liban, alors sous suzeraineté ottomane (1590-1633). Esprit éclairé, il est l'unificateur des druzes et des maronites et par là même, le fondateur du Liban moderne.

L'unification des sujets

Son père portait un prénom turc, Qorqmaz, «sans crainte». Un nom sans doute donné en guise de message à la Sublime porte, qui, au XVIe siècle, achevait d'étendre son autorité sur la région. Qorqmaz conduit ainsi une révolte contre les Ottomans en 1584. Elle est matée l'année suivante par Ibrahim Pacha, gouverneur d'Egypte, qui dévaste la région et tue l'émir. Qorqmaz laisse deux garçons en bas âge : Fakhr ad-Din et Yunus. En 1590, Fakhr ad-Din, l'aîné, a 18 ans et possède déjà toutes les qualités d'un homme politique. Il prend en main l'administration de la province du Chouf et son autorité s'étend rapidement de la chaîne de l'Anti-Liban jusqu'à la mer. Il fait allégeance au Sultan et se lie d'amitié à son plus puissant vassal dans la région, Murad, pacha de Damas. Pour autant, il ne rompt pas avec l'orientation de ses prédécesseurs. Comme eux, son objectif est d'élargir son territoire et de fonder les bases d'une entité politique souveraine sur les pachaliks ottomans de Damas, Tripoli et Saïda. Mais en stratège militaire et en homme d'Etat, il a compris qu'il devait opter pour d'autres moyens. A l'intérieur, il veillera à unifier ses sujets, notamment en consolidant le noyau constitué par les communautés druze et maronite. L'un de ses historiographes, le patriarche Stéphane ad-Duwayhi souligne ainsi dans son Târikh al-azmina que sous son règne, les chrétiens bénéficient de privilèges réservés jusque-là aux seuls musulmans. Ils sont notamment appelés à participer à l'administration du pays et à s'engager dans l'armée. En accordant à tous les chrétiens une égalité avec les druzes, les sunnites et les chiites, en renforçant la cohésion sociale, Fakhr ad-Din inaugure également une ère de prospérité, – notamment pour les maronites, sur lesquels les pachas de Tripoli faisaient peser de lourds impôts. «Les chrétiens tinrent la tête bien haute dans l'Etat de Fakhr ad-Din, car la majorité de ses soldats étaient des chrétiens, de plus ses conseillers et serviteurs étaient maronites», écrit encore ad-Duwayhi.

Les bases de l'Etat moderne

Sur le plan extérieur, celui que Louis XIII appelait Ficardin, et à qui il écrivait «très illustre et puissant Prince», cherchera également à nouer des liens par-dessus les lignes de partage politico-confessionnelles. Ses diplomates sont choisis avec soin : un sunnite auprès de la Sublime porte ; un chiite auprès du chah de Perse et, auprès des nations européennes, un prélat maronite. Bravant le privilège accordé aux seuls Français dans l'empire ottoman, Fakhr ad-Din signe avec le duché de Toscane un accord commercial, qui, au surplus, contient des articles secrets de nature militaire. La coopération technique avec Florence permet de développer l'agriculture, la production de la soie, mais aussi de créer, dès 1610, dans le couvent chrétien de Mar Kozhaya, la première imprimerie d'Islam. Le pays est prospère et son territoire s'étend depuis Antioche au Nord, jusqu'à Palmyre à l'Est et Gaza au Sud (Turquie, Syrie et Palestine actuelles, respectivement). Cette politique souverainiste et ces succès suscitent la crainte des Ottomans. Ils organisent une campagne contre l'émir, l'incarcèrent et l'exécutent à Istanbul le 13 avril 1635. La structure proto-étatique mise en place, et l'union, dans la prospérité et l'égalité, des druzes et des maronites jetteront néanmoins, dès le XVIIe siècle, les bases de l'Etat moderne du Liban.



Envoyé de mon Ipad 

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