vendredi 29 juin 2012

A Beyrouth, des citoyens crient leur rage après « le massacre des cales phéniciennes »

A Beyrouth, des citoyens crient leur rage après « le massacre des cales phéniciennes »

Par Sandra NOUJEIM | 29/06/2012-OLJ

PATRIMOINE - Les constructeurs de Venus Towers se seraient fondés « illégalement » sur la décision, contestée, du ministre de la Culture Gaby Layoun, pour procéder à la destruction, à coups de pelleteuse, de fouilles portuaires à Mina el-Hosn.

Rage et amertume sont visibles sur les faces des quelque quarante défenseurs du patrimoine, venus dénoncer, même si la perte est irréversible, « le massacre », mardi, à coups de pelleteuse, des cales à bateaux phéniciennes de Mina el-Hosn, par les promoteurs du complexe Venus Tours.
Regroupés à midi devant le siège du ministère de la Culture à Verdun, les manifestants ont protesté contre « le vandalisme orchestré » par l'actuel ministre Gaby Layoun. Le 26 juin, ce dernier avait en effet officialisé ce que la société civile craignait depuis plusieurs mois déjà : il a émis la décision écrite de déclasser la parcelle 1 398 (Mina el-Hosn) du patrimoine historique à protéger, alléguant que « le site en question ne recèle aucune trace d'infrastructure portuaire phénicienne, ni même romaine », contrairement à la conviction de ses prédécesseurs, les anciens ministres Salim Wardy, Tarek Mitri et Tammam Salam. C'est sur cette décision que les promoteurs de Venus Tours se seraient basés pour entamer la destruction du site découvert sur leur terrain, comme le révèle Raja Noujaim, militant indépendant pour la protection du patrimoine. Or « tout acte fondé sur cette décision est illégal, puisque celle-ci n'a pas encore été publiée au Journal officiel. De plus, le délai de deux mois, à l'issue duquel elle entre en vigueur, est loin de s'être écoulé », dénonce-t-il.


Voies judiciaires
C'est pourtant sur la décision du ministre Layoun que se base la société Venus Towers dans ses motifs de défense devant les autorités judiciaires, auxquelles a eu recours mardi l'Association pour la protection du patrimoine libanais (APPL). D'abord, le juge des référés de Beyrouth, Nadim Zouein, alerté par des militants de la destruction du site, a ordonné mercredi l'arrêt total des travaux de construction des Venus Towers sur la parcelle, sanctionnant les constructeurs d'une amende de 100 millions de livres libanaises. Mais la procédure ne s'arrête pas là : les militants ont recouru en parallèle à la juge des référés de Beyrouth (il y en a trois au total) Zalfa el-Hassan, afin d'obtenir l'interdiction à toute personne d'accéder à la parcelle 1 398. Cette demande a été approuvée par la juge, qui a interdit cet accès pendant une semaine et décidé de la nomination de trois experts pour examiner ce qui a été détruit. Une autre voie de recours envisagée : le Conseil d'État, afin de dénoncer l'illégalité, non seulement de l'acte de destruction, mais de la décision du ministre Layoun en question.

Insulte aux citoyens
Les défenseurs du patrimoine accusent en effet le ministre Layoun d'être de connivence avec la société Venus Towers, depuis qu'il a décidé de nommer, en mars, un comité d'archéologues, dans le dessein de réfuter les constats du comité désigné par son prédécesseur, le ministre Salim Wardy, défendant l'existence de cales phéniciennes, qui n'auraient d'équivalent, selon ces experts locaux et internationaux, que trois autres dans le monde, notamment en Grèce et à Chypre. Indépendamment de la teneur des deux rapports, dont les détails techniques ont déjà été exposés dans nos pages (voir L'Orient-Le Jour des 24 et 28 mars 2012), la destruction d'un site, dont la préservation avait mobilisé la société civile et des spécialistes d'archéologie maritime, est en soi une insulte au peuple. « Notre identité nationale a été volée et meurtrie ! ! » scandent les manifestants.

Un passé dilapidé
L'anéantissement du port phénicien aura traumatisé les plus fervents militants, comme la présidente de l'APPL Pascale Ingea, qui avait organisé, tout juste trois jours avant la destruction des cales, un sit-in devant la parcelle des Venus Towers. « Alors que nous appelions à la sauvegarde de notre héritage, de ce qui nous appartient, de ce qui compose notre identité, nous avons reçu, trois jours plus tard, la belle réponse du ministre Layoun. Merci ! » a-t-elle déclaré. Sa pâle figure et sa voix étouffée par la perte d'un bien inestimable qu'elle s'était acharnée à sauver reflètent le traumatisme semblable à celui d'une personne qu'on ampute. Il ne s'agit pas là d'un portrait qui se veut dramatique. C'est l'état d'esprit réel que ressentent les individus sensibles à l'esthétique de la pierre, à la valeur des traces que lègue comme un cri de survie le passé. C'est le cas de Chrystelle et de Farid, deux jeunes étudiants de l'ALBA, qui estiment « honteux de détruire notre histoire » et s'indignent du silence des jeunes dans cette affaire ; ou encore de Waël Amhaz et de Jad Abdallah, deux jeunes consultants financiers, passionnés d'histoire et d'archéologie, ayant inscrit sur un carton : « Le phénix renaîtra de ses cendres et vous maudira. »

« Bientôt, des bulldozers détruiront Baalbeck »
Plus loin, une experte d'archéologie maritime et chercheuse à l'Institut français pour le Proche-Orient, Justine Gaborit, s'étonne de la destruction des cales « dans un pays qui revendique son passé phénicien. On aurait dû en préserver la trace, tant qu'on a eu la chance de la découvrir ». Priée d'établir une comparaison au niveau de la préservation des sites avec la France, elle reconnaît que « partout l'archéologie est perçue comme entrave à l'expansion économique, sauf qu'on oublie qu'elle est également associée au tourisme ». « En tout cas, même si en France des sites sont détruits, c'est toujours une solution intermédiaire qui est trouvée lorsque la société civile se mobilise pour leur préservation », ajoute-t-elle.

Ce qui accroît l'impact de la perte des cales phéniciennes, c'est que leur préservation n'aurait aucunement empêché l'édification du complexe : il n'aurait fallu que désaxer l'une des trois tours, comme le fait remarquer Pascale Ingea. Quoi qu'il en soit, « que le site soit ou pas un site de cales, ou qu'il soit une simple carrière, comme d'aucuns le prétendent, rien ne justifie la destruction de vestiges historiques ! » conclut-elle. Plus loin, Lynna lance un trait d'esprit, teinté d'une profonde mélancolie : « Bientôt, ils enverront des bulldozers détruire Baalbeck »... sauf si l'affaire des cales phéniciennes constitue un précédent en termes de sanction qui remettrait en question l'impunité sur laquelle s'édifient les constructions modernes, en bénéficiant de la couverture d'institutions officielles.
Au sein du ministère de la Culture, déjà, la polémique bat son plein. Hier, un archéologue contractuel, Hisham Sayegh, a présenté sa lettre de démission au ministre Layoun, l'accusant de « détruire, comme aucun ministre avant lui, les trésors du Liban ».

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A Beyrouth, des citoyens crient leur rage après « le massacre des cales phéniciennes »

http://www.lorientlejour.com/category/%C3%80+La+Une/article/766052/A_Beyrouth,_des_citoyens_crient_leur_rage_apres__%3C%3C+le_massacre_des_cales_pheniciennes+%3E%3E.html


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jeudi 28 juin 2012

Au Liban, un port phénicien détruit par des promoteurs - Yahoo! Actualités France

Au Liban, un port phénicien détruit par des promoteurs

Beyrouth est de nouveau confrontée à la destruction de son patrimoine. Le démantèlement d'un édifice vieux de 3000 ans provoque l'indignation.

Même s'il avait été découvert récemment, c'était un symbole de l'histoire du pays et de l'identité libanaise. Le port phénicien de Beyrouth , situé à Minet el-Hosn, a été détruit mardi par des pelleteuses. Un complexe immobilier pourrait bientôt remplacer l'édifice historique.

Arrivée mardi matin sur les lieux pendant la destruction, la présidente de l'Association pour la protection du patrimoine libanais (APPL), Pascale Ingea, a aussitôt contacté son avocate pour faire cesser les travaux. Un juge a été saisi, et, une demi-heure après, les travaux étaient interrompus. «Les ouvriers nous ont empêchés de filmer», raconte Pascale Ingea au Figaro . La société immobilière a été condamnée à suspendre les travaux et à payer une amende de 50.000 euros. «Malheureusement 90% du port a été détruit», se désole Pascale Ingea, qui précise que son association va entamer des poursuites judiciaires pour imposer la reconstruction de l'édifice «même si c'est en béton».

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«Crime contre l'histoire du Liban» Découvert il y a deux ans, au début du chantier, le vestige devait être classé au patrimoine culturel libanais suite aux conseils de plusieurs experts internationaux. C'était également la volonté du ministre de la Culture de l'époque, Salim Wardé. Selon les militants, son successeur, Gaby Layoun, un allié du Hezbollah, n'a pas voulu publier au Journal officiel la décision de son prédécesseur, facilitant la destruction du vieux port antique. «Nous soupçonnons qu'il y a de la corruption dans ce dossier», affirme Pascale Ingea. Elle ajoute qu'un autre site antique de la ville a failli connaître le même sort. Classé au patrimoine culturel, l'hippodrome romain devait être détruit pour laisser la place à des tours d'habitation. La mobilisation des militants a (...) Lire la suite sur Figaro.fr

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mardi 19 juin 2012

22 juin: Sit-in de l’APPL pour sauver le port phénicien de Minet el-Hosn à Beyrouth | Libnanews

http://libnanews.com/2012/06/17/22-juin-sit-in-de-lappl-pour-sauver-le-port-phenicien-de-minet-el-hosn-a-beyrouth/


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Quelle protection pour le patrimoine en temps de conflits armés ?



Quelle protection pour le patrimoine en temps de conflits armés ?

Par May MAKAREM | 19/06/2012-OLJ

À l'initiative de l'ambassade de France et en collaboration avec l'Unesco et l'Institut français du Proche-Orient (IFPO), un séminaire régional portant sur la protection du patrimoine en temps de conflits armés mais aussi en période de paix a réuni à Beyrouth une trentaine de professionnels et experts venus de France, d'Égypte, d'Irak, de Jordanie, de Palestine et du Yémen.

Le coup d'envoi du séminaire régional sur la protection du patrimoine qui s'est déroulé à l'Institut français du Liban a été donné par le ministre de la Culture Gaby Layoun, le Premier conseiller à l'ambassade de France, Didier Chabert, et le directeur du bureau régional de l'Unesco, Hamed al-Hammami, qui a souligné la nécessité de sauvegarder le patrimoine moyen-oriental, « l'un des plus importants au monde ». La rencontre s'est articulée autour de trois axes : « La situation du patrimoine en temps de crise » ; « les méthodes de protection, à savoir l'inventaire et les moyens juridiques » et le thème « patrimoine et population : pour une plus grande synergie ».

Vu la situation politique au Proche-Orient, l'une des questions majeures développées par les experts au cours du séminaire est la gestion du patrimoine matériel en période de guerre ou de crise. Christophe Jacobs, président du Comité français du Bouclier bleu, préconise en ce cas de marquer les sites et les monuments à protéger du symbole du Bouclier bleu. Un emblème qui ambitionne de devenir un jour la Croix-Rouge des biens culturels. Il donne à titre d'exemple la Libye où le comité local du Bouclier bleu avait adressé aux autorités militaires et diplomatiques des pays ayant pris part aux opérations militaires la liste des biens culturels susceptibles d'être endommagés. L'évaluation menée plus tard sur place a permis de constater que « les bombardements avaient épargné le patrimoine et que les dommages étaient relatifs », a-t-il fait observer.

Ce à quoi la conservatrice du musée de Bagdad, Kaab Khawla Maarij Khalil, riposte en déclarant que les conventions de La Haye et autres protocoles ne sont pas toujours respectés, mais plutôt bafoués, piétinés, en temps de guerre. Ainsi, lors de l'invasion en 2003, les forces de la coalition se sont « acharnées à vider l'Irak de son héritage et à causer des dommages importants à de nombreuses villes antiques, dont Babylone et Kirkouk, qui ont été la cible directe de bombardements massifs », a-t-elle dénoncé, relevant que « le musée a été systématiquement pillé sous les regards indifférents des soldats américains » et que « quatre mille objets et sculptures y ont été volés ». C'est toutefois grâce à la coopération internationale et des partenariats régionaux que certains de ces biens culturels ont pu être restitués par la Syrie, la Jordanie et le Koweït, a ajouté Kaab Khawla Maarij Khalil.

Les actes de pillage et de vandalisme existent aussi au pays de la légendaire reine de Saba, et ce bien avant la révolte contre le régime de Ali Abdallah Saleh, en 2011. Abdel Aziz al-Gendari, conservateur du musée national de Sanaa, et Raga Ba Taweel, directrice du musée d'Aden, ont donné un aperçu de l'état de dégradation des monuments ; des fouilles clandestines qui alimentent un prospère trafic d'antiquités et des constructions illégales dans les zones des sites historiques. D'autre part, l'absence de campagne de fouilles préventives, principalement lors des travaux d'infrastructure entrepris ces dernières décennies, a entraîné une perte de données scientifiques du passé. « Le manque de volonté des autorités locales » menace le patrimoine, a dit la directrice du musée de Sanaa, indiquant que la loi yéménite sur les antiquités apporte les dispositions nécessaires à la mise en œuvre des travaux archéologiques mais comporte des lacunes, notamment en ce qui concerne la protection du patrimoine et l'étude préventive des sites.

« On ne peut pas faire la guerre à la guerre uniquement avec des conventions, des protocoles ou des emblèmes », a déclaré l'ancien directeur général des Antiquités libanaises (DGA), Fréderic Husseini. Quand une attaque surprise, sanglante et dévastatrice fait souffler un vent de panique sur le pays comme en juillet 2006 et que les ONG et tous les ministères se focalisent sur la sécurité de la population, « la DGA se retrouve orpheline », dit-il.
Il raconte qu'ils étaient seulement huit personnes pour emballer et mettre à l'abri 1200 pièces du musée, et un autre millier d'objets dans des chambres fortes, pour copier archives et inventaires sur des disques durs avant de les déposer en lieu sûr. Le tout en 48 heures. Entre-temps, les gardiens des sites archéologiques avaient déserté, exposant les lieux à tout venant. Cette expérience vécue a poussé, en 2009, la DGA à participer à un séminaire organisé à Beyrouth par l'Unesco pour étudier la possibilité d'adhésion du Liban au deuxième protocole de la Convention de La Haye (1999).
Ce séminaire, indique M. Husseini, avait dégagé plusieurs recommandations, notamment l'adaptation des législations nationales; la mise en place des plans d'urgence en matière d'inventaires, de documentation et de cartographie; la création d'un comité de coordination interministériel doté de pouvoirs décisionnels et pouvant faire appel aux différentes organisations locales et internationales ainsi qu'à la Finul pendant son mandat ; la diffusion la plus large possible des règles de protection des biens culturels en cas de conflit armé, en particulier auprès de l'armée et des forces de sécurité. Mais aucune recommandation n'a été suivie d'action, révèle Husseini.

Cependant, « le grand danger, qui guette le patrimoine, reste sans conteste le manque des effectifs de la DGA », insiste Frédéric Husseini. Un gros problème soulevé par deux ex-responsables à la DGA, Hareth Boustany et Chaker Ghadban, qui au cours de leur intervention ont mis en exergue le manque des ressources humaines et des moyens financiers de cette fonction publique. « La DGA qui brasse une tâche écrasante et multiforme ne compte, affirme Ghadban, que cinq archéologues cadrés (pour tout le Liban), alors qu'elle en a besoin de plus de 500 ! » 

Continuité entre mémoire et projet 
Pour pallier toutes ces carences et limiter les risques en temps de guerre ou de crises, Fréderic Husseini suggère la mise en place pour chaque site d'un plan de gestion « soutenu par les services de sécurité et l'armée », et « porté par les collectivités locales, et incluant la Croix-Rouge et la Défense civile, dont les agents seront sensibilisés aux questions du patrimoine.

Un patrimoine qui englobe aussi l'héritage architectural, témoin de « l'évolution culturelle d'une société et d'une nation », a dit Hareth Boustany, qui note deux conditions indispensables à la préservation des bâtiments à caractère traditionnel : leur classement par décret présidentiel et non par décret ministériel qui est annulé à tout bout de champ ; et une politique de compensation financière qui ne grèverait pas le budget de l'État. Et de souligner qu'en milieu urbain, « on n'a pas le droit d'arrêter l'évolution et l'extension d'une agglomération urbaine et au cas où on voudrait garder les vestiges in situ, il faudrait qu'ils soient intégrés aux nouveaux bâtiments et présenté d'une manière cohérente aux visiteurs. Les exposer à ciel ouvert risque de les détériorer, d'en faire des dépotoirs pour les ordures, et de casser le tissu urbain ».

Chef du service des patrimoines de la Région Île-de-France, Arlette Auduc a fait observer que les départements qui ont pratiqué la politique de la table rase dans les années soixante sont actuellement « l'objet d'importantes opérations dites de rénovation qui, à leur tour, détruisent cet urbanisme décrié pour revenir à des projets moins durs », respectant (reflétant) un cadre de vie, fruit de siècles d'évolution et d'histoire. Pour ce faire, les élus ou aménageurs du département de l'Essonne au sud de Paris se sont dotés d'un inventaire appelé « diagnostic patrimonial » permettant de « définir ce qui peut et doit évoluer et à quelles conditions ». Cet outil de connaissance et d'aide à la décision se décline sous forme de fiches d'analyse succinctes des bâtiments du territoire, de synthèse par villes et surtout d'une cartographique de type SIG qui donne, pour chaque village, les éléments repérés comme intéressants, et les photographies correspondantes. Cette étude est une formidable aide à la gestion de notre territoire. Elle permet de mieux éclairer nos choix, notamment en matière d'habitat et d'urbanisme. Un inventaire, ce n'est pas une entreprise muséale ; c'est chercher à comprendre comment un territoire se métamorphose et comment il va continuer à évoluer. Il permet d'assurer une continuité entre mémoire et projet, en respectant l'histoire du territoire et donc de ceux qui y vivent. 
Forts du succès de cette méthode en Essone, le service des patrimoines de la Région Île-de-France mène d'autres opérations de diagnostic patrimonial sur les centres anciens des villes dans leur globalité. L'inventaire se concentre d'avantage sur le patrimoine ordinaire et industriel que sur le patrimoine exceptionnel qui est moins en danger, signale Arlette Auduc, ajoutant que la démarche s'élargit désormais au patrimoine du XXe siècle. L'intervenante met aussi l'accent sur l'importance de la mobilisation de la population. « La législation ne peut pas tout. La France dispose d'un large corpus de lois de protection de son patrimoine, mais lorsqu'il s'agit de son patrimoine de proximité, seule la mobilisation des populations, leur appropriation, leur attachement à ce patrimoine est à même de le sauver et d'empêcher sa destruction. » 

Les jeunes, acteurs-clés pour l'avenir 
Dans ce but, Jbeil se mobilise pour sensibiliser les habitants au respect du patrimoine c'est-à-dire à leur mémoire profonde. De nombreuses activités éducatives organisées pour les jeunes sont gérées par la municipalité, a signalé Najwa Bassil, conseillère municipale de la ville, annonçant aussi que des mesures de protection et des actions de mise en valeur ont été lancées. À titre d'exemple, le port est désormais une zone piétonne et l'espace de stationnement extra-muros a gagné 1250 mètres d'extension et a été doté de cinq navettes écolo et d'un service de valets parking. La réhabilitation des façades du grand souk, financée à hauteur de 1700000 dollars, débutera très prochainement. Un projet avec le musée de Genève est sous étude pour la rénovation du musée des fossiles.

De même, l'outil pédagogique élaboré par Claudine Abdelmassih pour le projet Mare Nostrum d'Euromed Heritage 4 a pour objectif la promotion du patrimoine auprès des enfants et de la jeunesse, groupes cibles à privilégier, car ils ont tendance à une acculturation et méritent une attention particulière. Intitulé « Itinéraire phénicien », il est destinée à faire découvrir aux jeunes de Tyr ce peuple de la mer qui a joué un rôle essentiel dans la diffusion de la connaissance et du savoir dans l'Antiquité sur le pourtour du bassin méditerranéen. Le plan comprend la visite du port, suivie d'explications, de recherches sur son histoire, de projection de film sur ses activités comme la pêche, les chantiers navals, la réparation des filets, les marchés, la fragilité des écosystèmes marin. Ces travaux sont suivis d'un atelier de dessin, de photographie ou d'expression écrite. Le projet Mare Nostrum qui accorde aussi une place importante à la valorisation des techniques ou artisanat en voie de disparition se greffe au projet CHUD, dit Claudine Abdelmassih. Le Cultural Heritage and Urban Development (dit projet CHUD) est une initiative du gouvernement libanais qui, par l'entremise du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) et avec le support de la Banque mondiale, de l'Agence française de développement et de la Coopération italienne, vise à protéger, réhabiliter et revitaliser les sites archéologiques et les centres urbains historiques de Tripoli, Baalbeck, Byblos, Saïda et Tyr. Et c'est l'architecte Jean Yasmine qui a offert une synthèse sur les travaux entrepris à Tyr, sur lesquels L'Orient-Le Jour y reviendra plus longuement.

Mais pour résumer, toutes les catégories du patrimoine, archéologie, architecture, environnement, sont fragilisées et l'essentiel des dégâts sont le fait de l'absence de plan de gestion et de mesures de protection. Aucune conservation n'est possible sans l'élaboration d'un cadre d'action pertinent qui engloberait les collectivités locales et les municipalités. Il faut toutefois leur donner les outils nécessaires à cela et les moyens adéquats pour y arriver.

Des recommandations ont été prises par les conférenciers parmi lesquelles :
développer les procédures d'inventaires des biens patrimoniaux ;
veiller à la cohérence et à l'effectivité des outils législatifs, et multiplier les échanges d'information au niveau national et international ;
en appeler, en ces temps d'instabilité, voire de conflit, à la vigilance et à la responsabilité de tous les acteurs de la chaîne patrimoniale et muséale, et de tous les acteurs du marché de l'art aux niveaux national et international, notamment dans le domaine archéologique ;
renforcer la protection des sites, des musées, des collections, des réserves et des archives ;
mobiliser les élus et faire en sorte que les citoyens deviennent des acteurs du patrimoine par une sensibilisation dès l'école et une participation active à toutes les étapes de la valorisation patrimoniale ;
inviter l'Unesco et toutes les institutions en charge de la protection du patrimoine à jouer un rôle effectif dans la protection des vestiges et matériels archéologiques en temps de guerre et de conflit.



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lundi 4 juin 2012

L’hippodrome romain de Beyrouth maintenu en l’état en attendant le verdict du Conseil

 L'hippodrome romain de Beyrouth maintenu en l'état en attendant le verdict du Conseil 

OLJ- 05/06/2012


M. Layoun a visité hier le site de l'hippodrome romain à Wadi Abou Jmil.
Le ministre de la Culture, Gaby Layoun, a visité hier les sites des fouilles archéologiques à Beyrouth, notamment l'hippodrome romain découvert à Wadi Abou Jmil, ainsi que les vestiges découverts dans le secteur de la place Riad Solh et qui sont de « la plus haute importance », selon un communiqué de son département. M. Layoun était accompagné d'un groupe d'archéologues.

Rappelons que les travaux de construction qui étaient supposés démarrer sur le site de l'hippodrome romain, sur autorisation de M. Layoun, ont été gelés, grâce à une décision en ce sens du Conseil d'État. Saisi il y a quelques mois par l'Association pour la protection du patrimoine libanais (APPL) d'un recours contre la décision ministérielle, le Conseil d'État que préside le juge Chucri Sader a ordonné, il y a quelques jours, un sursis à exécution de cette décision. Et pour cause : à l'expiration du délai réglementaire de 15 jours qui lui est donné pour apporter sa réponse à l'objet du recours, l'État libanais ne s'était toujours pas manifesté.

Pourtant l'APPL n'était pas la seule à avoir exprimé une opposition farouche à la décision de M. Layoun, qui avait autorisé, mais sous certaines conditions, au promoteur immobilier du site d'édifier un centre commercial qui intégrera l'hippodrome. Trois anciens ministres de la Culture, Tarek Mitri, Tammam Salam et Salim Wardy, avaient également vivement critiqué « un massacre du patrimoine historique et archéologique du Liban ». M. Layoun avait indirectement répondu à ses détracteurs en exposant, lors d'une conférence de presse, les raisons qui l'avaient poussé à autoriser le projet de construction sur le site, en expliquant plus particulièrement « les avantages » d'une telle mesure. Il avait notamment indiqué qu'il avait fondé sa décision sur un rapport d'experts de la Direction générale des antiquités, sachant que ses prédécesseurs s'étaient aussi fondés sur des rapports d'experts de la DGA pour ordonner le maintien en l'état du site.

Le sursis à exécution a été ainsi ordonné sur base du seul dossier, bien fourni cependant, remis par l'APPL au Conseil d'État. Il est intéressant de relever qu'un sursis à exécution constitue normalement un prélude à l'annulation d'une décision contestée. À moins que l'État ne décide entre-temps d'apporter une réponse argumentée au Conseil d'État et de lui fournir le dossier sur base duquel le ministère de la Culture avait fondé sa décision très contestée.
Le président du Conseil d'État, le juge Chucri Sader, a expliqué à L'Orient-Le Jour la procédure appliquée dans ce genre de situation en précisant que l'État bénéficie maintenant d'un délai de quatre mois pour présenter sa réponse. Ce délai prolongé s'explique, a-t-il précisé, par le fait qu'il appartient au service du contentieux de l'État, relevant du ministère de la Justice, de préparer le dossier et de le soumettre au Conseil d'État, qui, au vu des données soumises, pourra statuer sur le fond. La partie plaignante a ensuite deux mois pour apporter ses remarques au dossier, après quoi l'État bénéficiera de deux autres mois pour répondre, avant la décision finale du Conseil d'État.
Si celui-ci n'est pas convaincu, a encore expliqué M. Sader, il nommera ses propres experts et fondera sa décision sur leur rapport.

Il faudra donc attendre quelque huit mois, au plus tard, avant de connaître le verdict final du Conseil d'État, qui, on l'espère, statuera en faveur du maintien de l'hippodrome in situ.
 


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